lundi 23 mars 2009

Ooty


Le 18.03.2009

Coimbatore.

Une chambre un peu tristoune et très moyennement propre, à deux pas de la gare ferroviaire.
Lever : 4h00 du matin après quelques heures de sommeil employées à tuer des moustiques...
Le train pour Metupalayam part tôt pour que nous puissions attraper notre correspondance, un mini-train classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, qui doit nous ramener dans les montagnes, à Ooty !



...

La nuit a été courte, mais nous tenions absolument à prendre ce train. 

Une expérience intéressante... 

La loco ne tire pas le train, elle le pousse, et c'est très désagréable car cela s'opère par à-coups. Quant au bruit qu'elle fait, c'est entre le pas d'une infanterie avec des bottes en fer et la forge d'un titan métronome !... Quand on s'enfonce dans un tunnel, le bruit s'amplifie et la fumée de la chaudière envahit le wagon et nos poumons, y laissant un goût de soufre qui met un certain temps à s'estomper.
A part ça, la longue ascension conduit petit à petit dans les montagnes, traversant de jolies cascades, des champs de thé parsemés de Jacarandas (je ne m'en lasse pas !) et des petits villages d'altitude (Ooty est à 2200 m alors que Munnar n'était qu'à 1500 m).

Bouge ta tête
Vidéo envoyée par Kunlegs

...

Le wagon de deuxième classe dans lequel nous nous entassons est bondé ! Le trajet jusqu'à Ooty attire les touristes indiens de la "upper class" ainsi que des bandes d'étudiants.
En première, quelques occidentaux et la "super upper class" indienne avaient pris soin de réserver leurs places.



Le train est lent et effectue des arrêts fréquents pour recharger (ou désencrasser?) la machine à vapeur. Tout le monde se rue alors dehors et commence un joyeux bal de pauses et photos numériques (appareils, téléphones, camescopes) en famille, entre copains, seul devant le paysage.
L'air solennel, les doigts en V ou encore le torse bombé d'un conquérant, l'indien qui voyage est finalement très proche de son comparse occidental ou japonais ! A cela près qu'aucun d'eux ne semble fasciné par ce petit tchou-tchou qui nous porte en râlant et qui semble une antiquité bourrée d'arthrose.



Dans le wagon, la foire et les éclats de rire continuent, on change de place, on sort la tête par la fenêtre, l'ambiance est joyeuse !

Pendant l'une de ces escales, un jeune indien m'a gentiment demandé s'il pouvait me prendre en photo avec ma cigarette ! A chaque cigarette que j'allume, je suis l'objet de regards amusés, surpris et curieux car en Inde, les femmes ne fument pas.



...

Au bout du compte, nous nous retrouvons dans un petit village de 100 000 âmes (!) où l'on peut manger un excellent chocolat accompagné de brioches moelleuses. Notre petite chambre, un peu excentrée, à flanc de colline, donne sur un petit lac. Exactement ce qu'il nous fallait après une journée de bus et une de train.
Au programme des prochains jours : balades dans les montagnes.



...

Aperçu dans la rue : une femme écarte légèrement les parois de son sari, un petit jet d'urine jaillit à ses chevilles.

...

Il fait froid. Surtout la nuit.
Pour dormir, Claire a mis ses chaussettes, son caleçon long, un tee-shirt, un pull, sa polaire. Ensuite, elle s'est emmitouflée dans son sac à viande, enroulée dans une couverture qu'elle a recouverte d'une grosse couette en plume.
Là seulement, Claire se sent bien.


...

Le 20.03.09

Au bout de la montée, à Doddabetta view point, j'ai été le Mickey d'Eurodisney d'une horde de touristes indiens !
Une femme me fait signe pour que je vienne à ses côtés, poser pour la photo. Elles se sont ensuite toutes ruées autour de nous, se relayant à ma droite, à ma gauche, me bousculant parfois, devant une foule de flashs sur pattes !
Un homme s'est même agenouillé à mes pieds, en position "Bollywood romantique" .
J'ai aimé être la bête de foire, j'y trouve un équilibre.




...

Le 21.03.09

C'est l'après-midi et il fait chaud. D'autant que les journées passées à Ooty ont été froides et que nos corps ne sont plus habitués à l'étouffoir des plaines.

Dans la rue de cette ville dont je ne parviens pas à retenir le nom, des portraits de Amma jalonnent les carrefours et l'entrée des impasses.
Amma est une grosse dame très souriante et dont il semble émaner beaucoup d'amour. Elle est venue ici le 18 ou le 19 d'un mois que je ne saurais lire (c'est écrit en hindi !). A chacun de ses déplacements c'est la cohue; une foule se précipite pour aller voir la sainte femme et connaître enfin la chaleur de ses bras et l'amour de son câlin.
Car c'est pour cela que l'on va voir Amma, pour un câlin ("a hug") de quelques secondes dont certains disent qu'il change une vie !

...



A Ooty, nous avons marché dans des forêts d'eucalyptus : arômes et grincements de ces troncs colossaux. Dans les collines, terrasses, mimosas, effluves de mille senteurs.
Nous y avons aussi rencontré deux belges, un couple, sur le point d'achever un voyage similaire au nôtre, mais à rebours et en quelques mois seulement. ils étaient épuisés, n'avaient qu'une seule envie, rentrer à Liège, ne parlaient plus que de ça !

...

Ici, dans cette ville dont je ne retiendrai jamais le nom, nous sommes venus pour marcher dans la réserve naturelle de Wayanad, réputée pour être sublime et peu courue. Nous avons atterri là parce que le contrôleur du bus a pensé que nous y serions bien. Un coup de fil a suffi pour calmer nos ardeurs : la réserve est fermée à cause de "wild fire"... pour deux mois.

...


Aujourd'hui, c'était aussi un peu la journée des New Age. Une canadienne venue faire quatre mois de tournée des ashrams du sud de l'Inde au petit dèj', et Peter, un instit' de San Francisco à la retraite, Paul Newman en chauve avec une moustache blanche, avec qui nous avons passé cinq heures de bus à parler du "Change we can believe in", de l'éveil des enfants, de l'ouverture aux autres et au monde, de l'esprit du surf qui ne meurt jamais, de l'Amérique comme "une grande puissance terroriste" (ses mots...) et des ashrams dans lesquels il fait si bon méditer. On a adoré Peter; il était super sympa, très "ouvert"...

...

Mananthavady : bide...

Après la fraîcheur d'Ooty, le chocolat et cette odeur subtile des fleurs de caféiers sur la route, on avait vraiment bien envie de se le faire, ce petit trek dans la jungle de Moogly !
Les éléphants sauvages, les tigres, et même l'écureuil bleu et rouge... rien de tout ça. La réserve est fermée.
Mananthavady : bled paumé, rien à voir, rien à faire, à part se résigner à poursuivre la route pour Mysore.
Petit calcul positif : on gagne deux jours et notre objectif est encore loin !
Nous avons hâte d'avancer, quelques pensées ruminées ces deux derniers jours et l'impression qu'on piétine malgré les heures de bus et la poussière avalées.
Vivement la splendeur des temples et les déserts d'Hampi.
Tout ça est devant nous !
En attendant, il nous reste du chocolat fondu et quelques cigarettes bon marché.




...

Nous sommes dans cette ville dont je ne me rappelle plus le nom et c'est la loose parce que Wayanad est fermé, parce que le Pachyderm palace n'organise plus de trek dans la région, parce qu'il n'y a donc rien à faire dans le coin.
Une nouvelle désagréable nous a plombés. Ca fait trois jours qu'on ne pense qu'à ça. Trois jours que nous avons quitté notre route adorée et l'avons échangée contre une amertume qui ne tarit pas.
On était venu ici pour changer d'air. Marcher un peu. Deux, trois jours.
Mettre loin toutes ces conneries. Mais ce ne sera pas pour aujourd'hui. Tant pis !

La certitude néanmoins de quitter le Kerala et le Tamil Nadu, que nous avons tant aimés (mais qui ont occupé le premier mois de notre voyage), nous fait du bien. Parce qu'en regardant la carte on sent qu'on a besoin d'avancer, et que là, quand on regarde la carte, on voit juste qu'on n'a toujours pas dépassé Chennai depuis qu'on a pris plein sud... Alors quand même, c'est bien de partir à Mysore dès demain. D'attaquer le Karnataka...

...

Ce soir, l'appel à la prière du muezzin au milieu des Klaxons et des coups d'accélérateurs.

La carte
Vidéo envoyée par Kunlegs

...

Le 22.03.09

A Mananthavady : un cadavre de chien sur le trottoir, la langue collée au sol, des mouches frétillantes aux fesses. Pas de blessure, mort de maladie cette nuit.



Deux scarabées affolés cherchant frénétiquement le calme dans la chambre éclairée par le néon. Retrouvés apaisés sous notre oreiller ce matin.

L'homme de l'hôtel, Groucho Marx un peu bronzé, souriant et aimable, perdu dans des formulaires qu'il veut consciencieusement nous faire remplir, ordonner, et envoyer aux autorités du coin. Il compte trois fois ses photocopies, les ramasse trois fois par terre après avoir essayé de les mettre en tas. Il sourit. Il est patient, comme indifférent. Il cherche notre clé dans son tiroir, les remue toutes, les regarde de près. En vain. Elles étaient devant lui, il ne les avait pas effleurées.


...

Ce monsieur me plaît beaucoup. Chaque échange avec lui est un ravissement et l'occasion toujours d'un grand éclat de rire.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Ils sont trop chouettes tes dessins Clairette, je suis ta première fan! Je consulte votre site avec petite Élise dans mes bras, le sourire aux lèvres. Nous suivons votre périple avec attention. On pense à vous très très fort. (I miss you)

Anonyme a dit…

Et vous dites que vous n'avez encore rien parcouru... eh ben, y'en a qui doute de rien... Nous d'ici, on trouve que vous avez déjà vu beaucoup de choses, et puis tout ne peut pas être au top tout le temps (ce serait beaucoup trop simple... la découverte d'un pays passe aussi par là non ?), c pas la course, continuez de prendre le temps de découvrir de belles choses et de faire de belles rencontres: CARPE DIEM !!!! et surtout, continuez de nous envoyer beaucoup de belles photos et de commentaires qqu'ils soient, qu'on vous envie, qu'on vous admire, et que de temps en temps on se fasse plaisir à vous remonter le moral, petits veinards...
Plein de gros poutous à vous deux
Armelle & co