mercredi 27 mai 2009

Mount Abu


Le 14.05.09

Mount Abu est un spot de vacances pour les classes moyennes indiennes avec tous les agréments qui vont avec ! L'espace-trampoline, les jets d'eau près du lac, les boutiques "souvenir" (comme celles pour les occidentaux, en plus bazar et moins baba-hippie !). Des chevaux décorés arpentent les rues en quête de cavaliers potentiels et les enfants peuvent acheter des armes en plastique un peu partout !!



C'est calme et la température a baissé de 10°C par rapport à Udaipur.

Nous avons fait une bonne nuit et nous partons en randonnée cet après-midi pour découvrir la faune sauvage et la flore locale.


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Le 15.05.09

Mount Abu, haut lieu du tourisme gujarati et rajasthani. Enfin un peu de fraîcheur la nuit et le plaisir, retrouvé, de se toucher sans déverser immédiatement des litres de sueur chaude.


Il ne fait cependant pas aussi frais que nous l'aurions souhaité. 35°C... Ce qui ne présage rien de bon pour les jours à venir à Jodhpur et à Jaisalmer.

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L'effet des crèmes blanchissantes sur la peau des femmes est catastrophique.

Il y a des photographes ambulants dans les rues.


L'ensemble est très criard, kitchissime, tout de néons colorés le soir, la nuit, de ice creams, de piste de roller, de pédalos à tête de cygne et de chevaux harnachés comme à la parade.

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Nous étions décidés néanmoins à aller marcher dans les montagnes, à retrouver un peu de nature après les villes polluées des plaines, et c'est ce que nous avons fait en fin d'après-midi.


Charles, notre guide, est réputé pour sa connaissance de la faune et de la flore. Il nous a donc emmenés, sur les traces des ours, à travers la jungle de la réserve naturelle de Mount Abu.

Plaisir de marcher en pleine nature, de respirer un air à peu près sain, de traquer, au détour d'un sentier, une famille de cervidés, des crocos dans un lac, diverses sortes d'oiseaux, et de suivre le caca plein de baies d'ours invisibles.

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Charles a 24 ans. Il est un peu rustre, mais il connaît bien son affaire.

En chemin, il nous fait part de ses rêves d'ailleurs : l'Australie, le Japon, la Suède, la Finlande, et surtout le Danemark. Charles a entendu dire qu'il était facile de coucher avec les filles au Danemark : "Free sex ! just for one night !" Et ça le fait rêver...

Il a deux objectifs dans la vie : aller sur une plage nudiste (l'idée d'une plage sous la neige avec des filles nues semble l'exciter absolument !) et rencontrer des lesbiennes, parce que, croit-il, il n'en a jamais vu (il pense que les lesbiennes se reconnaissent à ce qu'elles se livrent à des orgies de baisers dans la rue).


Je ne sais pas si Charles parviendra jamais à mettre les pieds au Danemark, mais j'ai des doutes concernant la réussite des entreprises de séduction qu'il ne manquera pas d'y mener !

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Cette balade dans les collines fut une vraie bouffée d'air frais. Nous avons tant apprécié être seuls face à un paysage ouvert et désert de toute habitation, sans circulation et sans Klaxons !


La température plus douce du coucher du soleil nous a montré combien nous étions rassasiés de grosse chaleur.

C'est à cette heure que nous avons joué les explorateurs discrets et silencieux, et pu observer des daims sauvages, de nombreux oiseaux et un crocodile inquiétant.



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Cette après-midi, douce promenade autour du lac en amoureux. Marche tranquille et dîner sur les hauteurs de la ville.

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Nous partons demain à Jodhpur, puis ce sera Jaisalmer, deux étapes qui vont nous replonger dans la fournaise des bas. Ici, à 1200 mètres, on supporte bien les 35°C, mais c'est 10 à 15°C de plus qui nous attendent...



Nous sommes tous deux lassés de passer nos journées dans la chambre à attendre des heures clémentes pour bouger. Nous sommes impatients d'en finir avec le Rajasthan et d'atteindre le Ladakh. Ma lecture des aventures d'Alexandra David-Néel dans les sommets enneigés de l'Himalaya attise mon envie de montagnes et de solitudes.

dimanche 24 mai 2009

Udaipur


Le 10.05.09

Une journée de route et nous voici à Udaipur, au sud du Rajasthan.

Lumière blanche, brume de chaleur, air chargé de poussière.

La ville est charmante : vieilles maisons blanches entourées de collines, ruelles étroites. Mais nous n'avons décidément pas de chance avec les lacs; celui de Pushkar était en travaux, celui-ci est à sec à cause du rythme trop irrégulier des moussons lors de ces dernières années. C'est quand même très beau !



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Hier soir, pleine lune sur le gopuram du temple à côté de notre guesthouse. Chauves-souris géantes décrivant des cercles dans la nuit noire.

Les gens dorment sur les toits.

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Un peu fatigués des visites par 40°C, nous n'irons pas voir le palais du maharadjah d'Udaipur. Nous ferons mieux que cela : nous nous offrons une nuit dans le palace flottant du lac Pichola.



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Le 11.05.09

Udaipur. La cité des contes ! Partout devant nos yeux, des façades de palais entourées d'oiseaux, des tours surmontées de dômes orientaux, des fenêtres en arabesques et le sourire de l'autre qui ne s'efface pas. Nous sommes joyeux !


Le lac est asséché mais la prairie marécageuse qui l'a remplacé me ravit; j'adore la touche verte qu'elle apporte au paysage blanc-ocre des édifices. Des saris fluos s'y promènent au milieu des vaches, des moutons, des grues, et on ne se lasse pas d'admirer le spectacle depuis le toit-terrasse des restaurants. Malgré la chaleur, il y a de la douceur dans l'air d'Udaipur et l'allure paresseuse des gens est un régal pour les yeux.



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Hier, arrivée à pied à l'embarcadère du Lake Palace.

Suants et recouverts de poussière, nous sommes accueillis par un géant en tenue immaculée et turban rouge grenat. Sans un regard pour notre allure ou notre absence de moyen de transport, le sourire aux lèvres, il nous offre une petite serviette fraîche, une bouteille d'eau et nous installe dans un canapé plein de coussins moelleux.


Dix minutes plus tard, notre barque est avancée et nous voilà voguant sous un baldaquin en brocard vers le palace, franchissant ainsi le bout de lac qu'il reste comme des invités d'honneur.

Deux porteurs d'ombrelles nous attendent à l'arrivée pour nous conduire dans le hall de l'hôtel où un cocktail de bienvenue nous est offert accompagné d'une touche de poudre fuchsia entre nos deux yeux. Le manager s'approche alors pour nous annoncer qu'au lieu de la chambre que nous avions réservée, nous logerions dans la suite de luxe réservée aux hôtes du roi.




Ainsi a commencé notre séjour dans le palace...

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"Salut à tous,

Pour mes trente ans, mon amoureux m'offre une nuit dans le "Lake Palace" d'Udaipur. Nous avons débarqué tout à l'heure [et] nous voilà invités par le roi dans la plus belle suite de l'hôtel [...] ! Nous avons donc un palais pour nous et une suite d'une beauté indescriptible; le dernier occupant était Mick Jagger !!!!

On est tout simplement assommé par le luxe et la splendeur de l'endroit : coussins en soie sauvage, fresques murales incrustées de bijoux, salle de bain en marbre blanc, plafonds décorés avec des miroirs, portes en bois sculpté, mini-canapés dans les alcôves des fenêtres, solarium privé avec vue sur le lac, bureau, salon, etc !!!

Il fallait que je partage cet instant magique avec vous !"

[Mail de Claire à quelques amis, cousins et cousines, le 10.05.09]

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A Udaipur, nous fûmes des rois le temps d'une nuit dans le Palais le plus magique du monde !


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Somptueux palace. Reçus comme des princes. Batteries rechargées.


Tellement rechargées qu'on change tous nos plans et qu'on décide de partir à l'ouest d'Udaipur, dans la station climatique du Rajasthan. On a besoin de fraîcheur, besoin de nature, besoin d'improvisation.

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Coucher de soleil sur la belle cité d'Udaipur. Perroquets et perruches, grues, sternes, aigles, cerfs-volants et cormorans.

Le lac asséché sert de pâturages, terrain de cricket, spot à palabres. Saris colorés au coin des femmes. Sobres chemises au coin des hommes. Partie de badmington dans le soleil couchant.



En cette fin d'après-midi, je retrouve le plaisir du voyage, lavé de la lassitude contractée à Agra. Le soleil se couche, pourtant, c'est pour moi la fraîcheur d'un matin.

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Le 12.05.09

Ce soir, spectacle de danses traditionnelles dans un vieux haveli restauré. Voyez vous-même...

Danses rajasthanies
Vidéo envoyée par Kunlegs

jeudi 21 mai 2009

Pushkar


Le 07.05.09

Ce matin, réveil à 5h00 pour une petite marche dans les alentours de Pushkar.

A travers mes paupières encore scellées par le caca d'oeil de la nuit, je devine les cohortes de femmes qui se rendent aux ghats pour la puja du matin dans la faible lueur de l'aube.

Nous passons dans des sentiers de poussière. Nous marchons sur le sable du désert qui entoure la ville. Nous arrivons aux pieds d'une montagne en forme de cône dont nous gravissons les marches avec difficulté (une pensée douloureuse pour notre projet de trek dans le Ladakh !).



Pendant l'ascension, le soleil surgit au-dessus des montagnes qui encerclent la vallée, paresseux soleil qui a dormi une heure de plus que nous ! Des paons léonent dans les collines. Nous contemplons le spectacle en compagnie d'une famille de singes.

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Pushkar a beaucoup changé depuis ma première visite il y a 7 ans.


Le petit village lavande en forme de croissant de lune qui embrassait le lac est devenu une ville.

Du haut de la colline, on perçoit bien les zones de constructions nouvelles, le tracé de la future ligne de chemin de fer, le travail des pelleteuses qui agrandissent le petit lac sacré. Ganesh, le jeune tenancier du tchaï shop près du temple, regrette (évidemment) ce temps révolu, et il prédit le déclin de la ville lorsqu'elle aura cessé d'être l'oasis de calme que viennent chercher les pèlerins et les voyageurs, et qu'elle aura perdu tout son charme (pour ma part, je l'imagine plutôt en Disneyland pour touristes indiens — finie l'épopée hippie ! — qui viendront se faire photographier près du lac ou qui célébreront là les baptêmes et les mariages...).



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En descendant, perruches, singes et dromadaires. Nuages de poussière au sillon des camions. La ville s'est réveillée.

Scène inimaginable il y a seulement quelques années : un scooter se pète la gueule en voulant doubler une moto au son de son Klaxon dans les ruelles de ce que l'on prendra bientôt l'habitude d'appeler "la vieille ville".


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Le 08.05.09

Anja rencontrée au petit temple ce matin :
"J'ai perdu mon boulot à cause de la crise alors je voyage.
— Tu faisais quoi ?
— Je travaillais dans la finance."




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Nous passons des jours très paisibles ici, même si la ville s'est agrandie, que le lac est en travaux et que les motos roulent comme des bolides dans les ruelles.

Hier soir, nouvelle expérience inédite. J'ai pris un cours de fabrication de bijoux !

Sunil est un professeur très patient et je me suis fabriqué un pendentif en argent et lapis-lazuli. Quatre heures de travail minutieux et précis, limes, pinces coupantes, colle, pince fine, chalumeau... j'ai tout manié avec la concentration d'un yogin !

Le pendentif
Vidéo envoyée par Kunlegs

C'est une expérience incroyable ! Je ne regarde plus les bijoux de la même façon; j'ai désormais l'impression de voir comment ils sont conçus !


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Ce matin, j'ai fait quelque chose que j'avais lu dans un livre de Nicolas Bouvier. Je me suis assis sur un muret dans la rue pendant une grosse demi-heure et j'ai photographié les passants.




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Un peu après, un peu plus loin, alors que j'achetais un paquet de cigarettes, une jeune femme assez vilaine avec un bébé dans les bras m'a demandé si je voulais bien lui acheter un paquet de biscuits pour nourrir son enfant. Pour me remercier, elle a tenu à me décorer la main au henné.



Comme elle avait la progéniture remuante, elle a voulu qu'on aille s'asseoir; elle m'a donc emmené à quelques mètres de là sur une marche où se tenaient trois jeunes filles très maquillées qu'elle m'a présentées comme "ses amies gitanes", et qui se sont rapidement chargées de dessiner les motifs végétaux sur la paume de ma main gauche, puis sur ma main droite, puis mon index gauche...

Je me suis enfui avant d'avoir les mains entièrement recouvertes de pâte brune à l'odeur désagréable...




Claire dit que j'en ai pour un mois !

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Coucher de soleil au bord du lac encombré de camions, de pelleteuses, de machines.

Sourires des rajasthanis, gentils, accueillants, chaleureux. En zone rurale, le plaisir retrouvé des débuts du voyage...


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PS : Avez-vous compté les doigts du prof de joaillerie ?

Jaipur


Le 02.05.09

Superbe chambre d'hôtel.
Et dans cette superbe chambre, une grosse fatigue et une grande lassitude... qu'il faut combattre assurément.

Garder sa capacité d'émerveillement intacte.
Garder un regard neuf et vorace.
Ne pas céder à la paresse...



Pourtant, neuf semaines à bloc et maintenant, envie surtout de rester au lit avec un bon film.

Trop de gens, trop de visites, trop de tourisme pour moi...

Arriver dans une ville, dealer un rickshaw, s'installer dans un hôtel, une guesthouse, ouvrir le guide, faire le tour des points d'intérêt, prendre un bus, un train, arriver dans une ville, dealer un rickshaw...

Fatigue de tout ça.


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Jaipur est une tumeur, une métastase urbaine grise et polluée.
3 millions d'habitants !...

Quand on lit les pages des guides, les noms depuis Bénarès font rêver... moghols, rajputs, seigneurs de guerre, empires, maharadjahs...

Aujourd'hui je ne vois que de grandes avenues poussiéreuses et des gens crottés... Des traces certes de tous ces noms, des traces, mais dans le bruit, au coeur de la foule, des émanations de gaz d'échappements.




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Le 03.05.09

Ce matin, Sun Temple au sommet d'une colline.
Nombreux singes, chèvres, vaches.

Puis, décevant palais de maharadjah devenu musée : robes d'apparats, pacotilles, gigantesques jarres en argent, arsenal du Moyen-Age rajput, salle d'audience... Le faste de ces princes gâtés par les anglais et qui ont laissé leur Etat devenir l'un des plus pauvres de l'Inde indépendante.


Dernier stop touristique au Palais des Vents, et un arrêt dans la famille de notre rickshaw pour porter chance au mariage de son frère...

Nous avons maintenant des grelots au poignet.

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"Dans les villes indiennes, les rues ressemblent souvent à des chemins d'asphalte hésitants, bosselés, mille fois réparés, serpentant entre des tas de poussière, de saleté et de tout ce que l'on abandonne dans les rues et qui y reste, c'est-à-dire du sable, du gravillon, des détritus, périssables ou non : rien n'a jamais l'air fini, il n'y a pas de trottoir, pas de mur, tout paraît être à mi-chemin, à mi-chemin entre être et cesser d'exister."

[V.S. Naipaul, L'Inde]

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Superbe chambre d'hôtel.

Dans cette superbe chambre d'hôtel, une grosse fatigue et une grande lassitude... qu'il faut combattre

assurément.

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Jaipur. Une ville poussiéreuse, bruyante, pleine de regards lubriques qui me mettent un peu mal à l'aise. Jusque là, je n'avais pas senti autant, dans le regard et les interpellations des hommes, cet intérêt particulier pour l'occidentale...

Soucieuse de trouver mon encre de Chine, je laisse tout ça glisser sur moi en me couvrant la tête de mon foulard. Après une excursion pénible à pied, puis en rickshaw, je reviens bredouille à la maison où Julien cuve sa baisse de moral dans le confort de notre charmante guesthouse.



Ce matin, visite un peu décevante du City Palace compensée par une grimpette charmante en haut d'une colline où trône un petit temple. De là nous avons une vue plongeante sur la ville rose et ses imposantes portes sculptées. Tout autour : des collines sèches, des cailloux sablonneux, des arbustes épineux et rabougris; nous entrons sur des terres où les habitants sont accoutumés à la chaleur et à l'aridité du désert.


La visite de Jaipur ne laissera pas un souvenir impérissable dans ma mémoire, mais j'ai envie de découvrir autre chose que l'atmosphère ultra-touristique qu'on ressent à saturation ici. Envie de trouver un peu d'authenticité parmi les couleurs vives des vêtements, les sourires et les regards des gens que l'on croise.