mardi 19 août 2008

Ambositra


Le 12.08.08

Taxi-brousse minibus japonais sur une bonne route goudronnée faite il y a 3 mois (première rénovation depuis 1982, par une entreprise grecque spécialisée dans le bâtiment ! mais dont les patrons sont les amis du président...).

- routes goudronnée = vitrines du tourisme malgache -

Mais... le malgache est souvent malade en voiture. A plus forte raison en taxi-brousse, surtout lorsque celui-ci roule à tombeau ouvert sur une route de montagne, sous la pluie sans essuie-glace et de nuit... Certains vomissent donc sans façon par la fenêtre (derrière nous, un homme, 4 fois pendant le voyage a repeint la carrosserie...), d'autres utilisent de petits sacs plastiques qu'ils jettent ensuite par la fenêtre, ce qui attire la convoitise des chiens errants et de quelques lémuriens gourmets (autre petite pensée pour Pierre Marieu !...)

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Arrivée à Ambositra à 1h00 du mat'. (RN7).

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Collines rouges, petits villages de maisons ocres, églises en brique, pêchers en fleurs.


Ambositra est une petite ville de briques rouges au coeur de l'artisanat des Hautes Terres. Entre les échoppes, vazaha cinquantenaires sortant de 4x4 flambants neufs (nous sommes jaloux !). Guides improvisés plein les rues. Le DisneyLand malgache.

Il nous reste peu de temps. Aurions aimé aller marcher en forêt, à l'est, au coeur du pays Zafimaniry, où chaque village est spécialisé dans une forme d'artisanat (principalement le bois), mais il aurait fallu 3 jours pour sortir du circuit usé (Odile et Alain nous ont mis en garde) que feront demain tous les touristes qui nous entourent, et nous ne les avons pas, ni ne souhaitons nous promener avec 50 vazaha dans un village de 150 âmes.
Nous irons donc à Soatanana, à l'ouest.
C'est un petit village spécialisé dans le tissage de la soie sauvage. Le circuit a l'air moins rôdé et les 4 à 5 heures de marche que nous ferons dans la région nous feront le plus grand bien après toutes ces journées de route.


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Ambositra. Pause déjeuner. Détente, repos, temps de réflexion : ça s'annonce bien.

Mais non, M. Casse-oreille débarque pour réjouir la clientèle touriste de son répertoire musical hors-paire !
Petit malgache d'une cinquantaine d'années bien basané, coupe yé-yé "casque", mi-longue, noire et défrisée, faciès merina édenté avec trois poils au menton (un artiste, quoi !) qui lui donne un air mexicain, juste ce qu'il faut.
Armé d'une vieille guitare grinçante ("dzoing dzoing"), il nous sert bien fort, l'air pénétré, une interminable série de chansons dont le spectre s'étend invraisemblablement d'"Oh when the saints" en malgache à "Etoile des neiges" avec son refrain alpin "yalala itou, laïtou..." qui lui va comme un gant !
Tout ça sort de façon incompréhensible de sa bouche avec une voix nasillarde à la Claude François ! Et ça dure !! Tout le repas !!

J'en ai des palpitations !


... Suis tentée de négocier le prix de son silence...

- Absolument insupportable ! Mais dansant !... -

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Le 13.08.08

Balade en Betsileo avec Robin, sur les collines, dans les rizières, dans les villages. Plaisir retrouvé de la marche et du contact qu'elle permet d'avoir avec les gens. Partout, parfum des mimosas, d'eucalyptus, petites fleurs roses et délicates des pêchers, éclats de ciel dans les vallées.

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Randonnée à travers les rizières et les villages de la région d'Ambositra. Sur notre parcours vers Soatanana, le village d'artisans qui fabriquent les tissus en soie, nous faisons, en début d'après-midi, une escale dans la maison d'une très vieille dame.

Elle a 92 ans, ce qui, étant donné l'espérance de vie à Madagascar (62 ans je crois...), est un chiffre digne d'un grand respect.
Après s'être renseigné dans le village, Robin nous conduit vers la maison de l'"ancienne" où une ribambelle d'enfants très jeunes nous accueillent tout excités en nous touchant, nous encerclant, nous inondant de rires pleins de dents noircies...


Nous montons l'escalier à colimaçon en bois à tâtons, les yeux habitués à la lumière vive du soleil de 13h00.
En haut, une dame d'une quarantaine d'années (peut-être...) nous introduit dans une petite pièce. Au sol, du parquet, dans la chambre, un grand lit, deux chaises, et quelques caisses pour les vêtements et les couvertures. Là, nous attendons patiemment... 
Les enfants (5 ou 6) jouent autour de nous.
Un petit de 2 ans joue à toucher ma jambe et se mouche presque dans mon pantalon. Deux autres rampent devant nous, astiquant le parquet. Une petite fille (l'aînée) déambule dans la chambre en chantant "Au clair de la lune" en boucle... Nous sommes l'élément perturbateur dans leur quotidien, une curiosité, un spectacle !

Occupée à regarder et à sourire au bébé qui s'est glissé sous ma jambe droite, je n'ai pas vu tout de suite la "sage" entrer.




Telle une tortue, courbée, elle avance à petits pas lents, lentement, les yeux rivés sur le sol qu'elle ne voit plus. A ma hauteur, elle tend la main cherchant la mienne, et je la salue respectueusement. Après avoir salué Julien, elle s'assoit sur le lit, en face de nous.

Notre conversation fut brève, nous avons partagé un long silence en compagnie de cette vieille dame dont l'image ne put que nous inspirer un profond respect pour la dureté de sa longue vie, percevant encore quelque part (dans sa façon d'exiger un peu de silence et de tenue à ses arrière-arrière-arr...petits-enfants, sans doute) une force admirable.

Après nous être remerciés mutuellement pour ces instants partagés, nous avons repris notre route vers la soie !

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A Soatanana, les villageois se sont réunis à notre arrivée pour exposer leur travail.

La négociation est rude (chaque habitant a son mot à dire !), mais nous sommes devenus des durs !





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Nous avons quitté le village avec l'impression que nous n'avions jamais été aussi bons dans cet exercice... Quand on a demandé à Robin ce qu'il en pensait, il nous a expliqué que nous avions obtenu le tarif "merina", à mi-chemin entre les prix pour les vazaha et ceux pour les autres malgaches !...
Alors nous, comme normalement on est des gros nuls en négoce et marchandage, ben on est super content !


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Le soir : magret de canard au miel et au gingembre. Un pur bonheur !
 

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